[AV/T] Noel Lavallière - Présentation

Impossible de distinguer son appartenance à une quelconque agence héroïque au premier coup d’œil. Son magnifique costume d'agent du bien ? Elle croupie au fond d'un coffre avec les conneries qui vont avec. Un t-shirt quelconque surmonté d'un sweat noir viennent le remplacer. Le tout un peu ample tend à épaissir sa carrure déjà bien imposante. Son bermuda troué ne vient pas remonter sa côte stylistique, pas plus d'ailleurs que ses espadrilles aux semelles tellement usées qu'il pourrait marcher pied nu sans ressentir une grande différence. L'important étant qu'il se sente bien dans sa tenue quotidienne, l'armure de son alter apportant déjà son lot d'inconfort. C'est pas top prestance, mais ça a le mérite de lui donner un certain style. Et en bonus, il peut fourrer dans ses poches quelques pommes et un bon bleu d'Auvergne. Ca donne faim de sauver le monde.

Quand il ne s'est pas trop amoché à cause de son alter, Camille donne l'air d'un type confiant marchant d'un bon pas rythmé. Son regard affûté balaye toujours en permanence ses alentours et ne laisse jamais rien passer. Mais derrière cette allure assurée se cache un corps meurtri, couvert de cicatrices de la tête aux pieds, triste témoignage des ravages de son pouvoir. S'il arrive encore à en faire usage, c'est bien grâce à la boxe anglais pratiquée depuis tout petit qui lui a donné un cœur solide et une endurance au-dessus de la moyenne. Probablement le seul bon choix que sa mère ait pu faire pour lui.

Comment parler de Noel sans aborder cette froideur dans son regard qui donne l'impression qu'un mur s'installe entre lui et le reste du monde. Tirant vers le bleu pâle, ses petits yeux plissés et ses sourcils froncés par nature lui donne un regard sérieux et inquiétant. Pour ne rien arranger, il ne sourit que rarement et son teint blafard laisse penser que le soleil n’a que rarement eu l’occasion d’apposer sa marque, même après tant d'années. Au moins a-t-il la chance d'avoir de beaux cheveux courts bruns et une barbe parfaitement rasée qui lui donne une allure fraîche et pleine d’énergie.


Noel Lavallière est un homme fondamentalement honorable et honnête. Deux qualités dont il peut être fier considérant l'éducation torturée qu'il a reçu d'une mère ignoble et d'un père absent. Forcé très tôt à être indépendant, il a su se forger un esprit de guerrier. Lorsqu'il se fixe un objectif en tête, il s'y dévoue corps et âme sans concession. Abhorrant la médiocrité, il a tendance à ne compter que sur lui-même. Il se contrefout de l'avis ou de la reconnaissance d'autrui, ne portant en estime que sa propre opinion. Une telle mentalité l'a indéniablement conduit à s'isoler de toute forme de relations sociales en dehors des obligations professionnelles.

L'optimisation est un maître mot chez lui, raison pour laquelle les flemmards et les paresseux ne lui inspirent qu'une profonde antipathie. Il déteste attendre, et encore moins perdre son temps. Ainsi il parle vrai et sans détour et tombe facilement dans le sarcasme quand ses interlocuteurs sont incapables de faire l'effort de connecter au moins deux neurones pour le comprendre. Tact et diplomatie ne s'interposent donc que rarement pour lui faire tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler.

Derrière cette mentalité élitiste et impitoyable se cache néanmoins un cœur plein de bonté et une douceur depuis longtemps oubliée qui ne demande qu'à être déterrée. Noel est simplement un homme profondément déçu de ce que le monde avait à lui offrir qui espère redonner un sens à sa vie en embrassant la carrière de héros.

Une salle austère. Le plafond était bas et la peinture blanche des murs s'effritait. Une grande table où était disposée trois chaises servait comme seul mobilier.

– Alors, comment s'est passée ta semaine Noel?
– Bien.
– Pas de problèmes ou d'échau...
– Elle s'est bien passée.

La voix rocailleuse coupa court à l'interrogatoire de politesse.

– ... Parfait. Madame la greffière, la séance va démarrer. Nous sommes réunis en ce jeudi 15 juin 301 pour parler de ta demande d'émancipation. Sont présents Noel Lavallière, le requérant, Justine Dubois gréffière près du du tribunal d'instance ainsi que moi-même, Valérie Rousseau, juge des tutelles. Noel, peux-tu nous expliquer les motivations qui t'ont poussé à la formulation d'une telle demande?
– Je pars vivre au Japon, j'ai besoin d'être juridiquement indépendant pour toutes les procédures administratives.
– D'habitude l'émancipation ne peut être demandée que par l'accord d'un ou des parents. Pourquoi ne pas vous être adressé à eux ?
– Parce que mon père a engrossé ma mère sans le vouloir et s'est tiré bien loin de la juridiction française, et que ma mère, quand elle est sobre, ignore mon existence.

Le ton était monotone, comme une pâte qui sortait progressivement d'une machine industrielle, sans émotion ni âme.

– Donc tu voudrais vivre au Japon?
– Oui
– Pourquoi un tel changement?
– Je vais rejoindre le lycée Yuei.
– Le seul établissement encore habilité à former des héros au Japon n'est-ce pas ? C'est pour devenir un héros que tu souhaites le rejoindre ?
– Non pour apprendre à réparer des machines à laver.
– Pardon ?
– Oui c'est tout à fait ça.
– Et pourquoi ne pas rejoindre une filière héroïque française ?
– Parce que mon enculé de beau-père m'a blacklisté de tous les lycées de la région. Je suis un frein à ses coïts quotidiens.
– Madame la greffière, supprimez cette phrase. Noel, tu sais que je veux t'aider mais il va falloir faire un effort sur ton langage si tu veux cette émancipation. Reprenons, pourquoi ne pas rejoindre une filière héroïque française ?
– Parce qu'ils ont tous refusé mon admission pour des motifs douteux.
– Je vois inscrit sur ton dossier que tu aurais eu une altercation violente avec ton beau-père en avril 298. Ne serait-ce pas plutôt cela qui aurait joué en ta défaveur ?
– Il avait levé la main sur elle, il aurait mérité qu... Oui, c'est à cause de ça. J'ai suivi un programme de gestion de la colère pendant un an après cet affaire et le juge a décidé de ne pas faire figurer cet événement sur mon casier.
– Je comprends. Mais mon rôle en tant que juge des tutelles est de choisir la meilleure des solutions pour toi. Le Japon c'est un pays à la culture bien différente, à la langue différente. En plus il te faudra une source de revenus pour vivre là-bas et j'imagine que ta m...
– Bon écoutez, ça va faire trois ans que je bosse en tant qu'apprenti pâtissier pour accumuler de quoi me tirer de cette vie. Je parle l'anglais couramment et je me suis débrouillé pour faire une formation à distance sur le B-A-BA de la langue japonaise. Et par-dessus le marché, je suis en train de négocier avec une boulangerie sur place pour obtenir un visa en tant que main d’œuvre qualifiée. Je me fais un cul gros comme ça pour me sortir de la merde qu'est ma vie actuelle, tout ce que je vous demande c'est de signer un bout de papier pour que je puisse décider de comment gérer ma vie à la place d'une alcoolique. Je suis pas juriste mais ça me semble pas si compliqué à prendre comme décision.
– ...