Homura Yusuke

Nombreux sont les points sur lesquels Yusuke se démarque physiquement, mais chacun est un choix, une partie de son histoire. Ses muscles taillés presque sur mesure sont le fruit de nombreuses années passées en tant que militaire, dont il n’en regrette pas une seconde. Les multiples cicatrices travaillant l’ensemble de son corps sont les marques personnelles d’échecs qu’il s’est juré ne plus connaître. Le léger rauque de sa voix… Une conséquence de son tabagisme. La sévérité presque hautaine de son regard, le fruit de son expérience. Ses habits, soigneux et tirés à quatre épingles, sont eux le reflet de la position qu’il a choisi d’occuper. Enfin, sa peau couleur café au lait est le seul héritage qu’il a de sa mère et, si elle a été sa malédiction pendant l’enfance, il l’a toujours aimée.
Le tout est doublé d’un charisme et d’une maîtrise du langage corporel créant un mélange à la fois imposant et harmonieux. Que ce soit à la façon dont il tient sa cigarette ou à celle dont fait craquer ou bouger en permanence ses doigts, on devine aisément qu’il est de ces personnes sachant exactement ce qu’elles veulent de la vie. Ne vous fiez cependant pas aux apparences, c’est probablement l’homme le plus dangereux du pays.

D’un point de vue comportemental, le dirigeant du Syndicat est loin du psychopathe avide de richesses et de sang que l’on pourrait s’imaginer. Calme et méthodique, il est le genre de personne à creuser les tombes de ses ennemis afin de les y précipiter vivants – même s’il est recommandé de le fuir dans ses plus noires colères car il est alors incontrôlable. Ayant obtenu sa fonction par des moyens plus que discutables, le Homura est du genre qui admet que la fin justifie les moyens, jusqu’à une certaine limite obscure que seul lui connaît. C’est sa façon de parler lorsqu’il menace quelqu’un, d’un ton doux voire lancinant, qui est probablement l’une des meilleures preuves de la perversion qui habite cet homme. Il n’a d’estime ni de considération pour rien sinon les siens et ne reculera probablement devant rien.

Dans les faits divers, on peut noter qu’il est bisexuel par défaut, les émotions n’ayant aucune valeur lorsqu’on peut les créer, ce qui est le cas de son Alter. Ce même pouvoir, par le biais de son fonctionnement, le rend incapable de prendre du poids tout en le faisant manger et boire l’équivalent de trois personnes normales.

J’ai longtemps été seul dans ma vie. Différent de cette différence qui éveille à la fois curiosité et crainte. La couleur de ma peau. Ma famille. Mon alter, pour les rares qui connaissaient son existence. C’est une liste qui peut continuer encore, mais honnêtement, je n’en ai rien à foutre.

Mon père et moi étions similaires jeunes – rebêles jusqu’au fond, emprisonnés dans une famille relativement traditionnaliste qui admettait que notre destin était tracé sans modification possible. Les « entreprises familiales » ne pardonnent pas, surtout la nôtre. Comme je me rappelle, à l’école, tous ces regards – enseignants, élèves. Tous savaient d’où je venais, en partie au moins. Rien de confirmé, comme toujours, mais assez de rumeurs et de luxe autour de mon enfance pour que tous sachent que j’étais littéralement intouchable.

Oh comme j’ai eu plaisir, à l’adolescence, de me libérer de tous les stigmates familiaux. Je n’étais pas idiot, persuadé que mon origine même faisait grincer des dents à la plupart de la famille, sinon mon père et mon grand-père qui ont toujours tout fait pour que je me sente chez moi. Sweat. Veste en cuir. Moto. Tabac. Drogue. Alcool. Au détail près de la famille criminelle, j’étais l’incarnation du petit délinquant de bonne famille qui comptait toujours sur papa pour être sorti d’affaire. Et il le faisait à chaque fois, parce qu’il avait été le même à son époque.

Jusqu’au jour où je suis allé trop loin. Ce n’était rien de fou, avec quelques autres de mon genre, des amis aujourd’hui, nous avons mis feu à une voiture afin de rigoler. S’il n’en reste trace dans les dossiers, un enfant est mort. Une mort inutile, la seule qu’on ne pardonne pas dans la famille. Je me rappelle encore de la déception dans le regard de mon père que j’aimais plus que tout malgré ma révolution personnelle. Des yeux perçants, fermés à moitié, teinté d’un imperceptible chagrin et ce… Ce gris imperceptible qui détruit une âme à distance.

Criblé sous mon tort, j’ai accepté sans mot dire la pénitence qu’il avait également traversé : l’armée. Si je sais qu’il avait été bien moins volontaire que moi à y passer, aucun de nous ne regrette. C’est durant sa période là-bas qu’il s’est assagi et, surtout, a rencontré ma mère lors d’exercices conjoints avec les Etats-Unis. Lui militaire, elle infirmière de guerre – il ne m’a jamais dit s’il s’agit d’une histoire d’un soir ou d’un réel coup de foudre. Toujours est-il qu’elle est tombée enceinte de moi, et qu’elle est morte en me donnant la vie. « Complication classique » selon les médecins.

Prenant de mes deux parents, j’ai suivi une formation de médecin militaire. De ceux qui vont sur le terrain et sauvent des vies ne tenant qu’à un fil, mais également de ceux qui restent dans les hôpitaux. On est toujours les deux sinon aucun. Et c’est aussi ici que j’ai compris… Malgré mes bonnes relations avec les autres, quelque chose me laissait entendre que je n’étais pas à ma place. Lorsqu’on nous exposait une stratégie militaire, mon cerveau ‘adaptait immédiatement au clan Homura et au Syndicat. Toute nouvelle information, dans cette instance de l’état, traversait le prisme de souvenirs et pensés diverses me ramenant toujours chez moi. Peu à peu au fil des années à penser et ressasser le passé que j’ai eu, une idée s’imposait à moi : je ne serai jamais à ma place sinon dans l’entreprise familiale, entouré de tous ces gens que je connaissais. De tous, c’étaient eux qui me manquaient. De tous, c’est eux qui m’ont toujours le plus accepté – et je ne leur ai jamais laissé la moindre chance. Ma décision était prise, et tout me laisse croire que c’est les mêmes raisons qui ont motivé mon père me ramener, bébé, au Japon.

Dix ans. Dix ans de formation et services. Dix ans après lesquels j’étais un homme différent, bien plus proche de ce que je suis aujourd’hui. Dix ans marqués par la mort de mon père – je n’ai rien pu faire sinon calmer les douleurs de son cancer – et la mort de mon grand-père, emporté par la vieillesse. Ce n’est qu’à mon retour à Sapporo que j’ai vu comme les choses avaient changé. Tout était devenu presque irréel. Rejoignant ma famille une fois de plus, je me suis affirmé parmi les miens grâce à ce que la vie m’avait appris.

Sous l’œil d’un oncle traitant l’être humain comme une pièce de rechange, je n’étais plus pour tous nos « employés » plus ou moins officiels un simple étranger ou un simple membre de la famille. A l’écoute, respectant autant que possible tous ceux qui travaillaient avec moi… Je suis devenu plus qu’un membre à part entière. Certains voyaient en moi un messie, alors que je ne voyais que le besoin du changement. Se perdre dans les traditions a été une erreur. Depuis toujours. Dans un environnement changeant, ne pas s’adapter est mourir.

Oh non. Je ne suis pas contre les méfaits du Syndicat. Je ne l’ai jamais été. Je ne suis pas un enfant de cœur, loin de là. Mais… Nous ne sommes pas des criminels, seulement des incompris faisant le nécessaire pour survivre et bousculer ce monde vers la direction qui nous arrange. Tout comme je l’ai fait en prenant la tête de la plus grande famille mafieuse à Sapporo, celle articulant toutes les autres, prenant la place de mon oncle... Ainsi que sa tête, qui doit toujours pourrir quelque part séparée de son corps depuis 4 ans déjà.

Si j’essaye encore et encore de rallier à ma cause, je ne peux hélas pas dire que ma position fasse l’unanimité. Que ce soit pour ma méthode de prise de pouvoir ou l’orientation nouvelle que je donne… Certains des groupuscules qui opèrent sous notre protection font ouvertement part de leur désapprobation, et j’imagine que d’autres le font en cachette. Qu’ils viennent. Je les convaincrai ou les ferai taire – je ne suis plus à ça près désormais.

Un monde de bandits. Sommes-nous si différents des héros ? Je pense que non. Nos méthodes diffèrent. Nos objectifs également. Mais en dehors de ça… Nous ne sommes tous que des enfants perdus qui s’en vont vers leur propre loi. Le gouvernement submerge son peuple de régulations et limitations tandis que le Syndicat observe patiemment. Un jour, tout s’effondrera. Nous n’avons besoin de l’autorisation de personne pour quoi que ce soit, et nous serons là pour prendre notre place au sommet du Japon. En attendant… Nous préparons calmement le terrain de notre domination, sous la couverture et avec l’aide scrupuleuse de toutes nos activités…. Un peu plus démonstratives.

Et… oui. Je vous vois. Je vous devine. Vous qui voulez trouver place au-dessus moi, tirer des ficelles qui ne vous appartiennes pas. Je ne ploierai aucun genou devant vous, même si j’accepterai de coopérer si besoin il y a. J’accepterai… Le temps de tailler le pieu sur lequel j’empalerai vos têtes avant d’arracher vos cœurs à la puissance de mes bras. Le Syndicat ne se soumettra à personne, et je ne laisserai personne me doubler dans la course à mon monde idéal...