Catch me if you can ◈ Rin

Toujours souriant, toujours heureux. Rin met un coup de pied à la vie pour mieux la croquer à pleines dents. Oh que non, il ne dramatise pas sur son obscur passé, car rien n'importe plus que la brillance d'un avenir radieux !

Car oui, Rin n'a pas peur de demain. Il contrôle le moindre pan de sa vie, il ne montre aucune faille, aucun doute. La rue l'a endurcit, elle a fait de lui quelqu'un de confiant, qui joue toutes ses pièces sans le moindre geste de travers. Ce garçon, c'est quelqu'un de malin, qui pense deux ou trois temps plus loin que le commun des mortels : c'est comme une seconde nature, un mix de vigilance, d'intelligence, d'instinct et d'une multitude de qualité qui font que, non, on n'arrive pas à le doubler.

Mais ce n'est pas pour autant qu'il se place sur un piédestal. Certes, il est l'un des meilleurs dans ce qu'il fait, mais il n'en demeure pas moins un fier homme du peuple. Ô combien les autres l'ont regardé de haut, doués de leur argent poche tout droit sorti du compte de papa-maman ? Voilà qu'ils triment comme des cols blancs avec des Alters minables, tandis que lui, grand maestro, trinque joyeusement sa pinte avec des musiciens tout en cachant ses millions.

Rin est un homme simple. Comme tout le monde, il ne recherche que le bonheur, mais il le fait juste d'un moyen peu conventionnel. Il a un goût prononcé pour les défis, et c'est d'autant plus vrai quand c'est lié au vol. Cambriolages, effractions et supercheries sont ses hobbies, plus pour l'adrénaline qu'ils procurent que pour l'argent en lui-même. Faut dire qu'il en a bien assez comme ça. Ce qu'il cherche, c'est à faire un pied de nez à ceux qui se croient tout permis dans une société qui les favorise, c'est de redistribuer les richesses et d'arroser les arroseurs..

Bref, de faire de tout endroit où il se trouve un terrain de jeu où c'est lui qui fixe les règles.

Aussi loin qu'il se souvienne, la vie n'a jamais été qu'une vaste mascarade.

Une comédie, si absurde, qu'elle en est devenue la norme.

Mais quitte à se produire sur scène, pourquoi ne pas y prendre un peu de plaisir ?

Amano Rin est né dans un recoin crasseux de Roppongi. Mauvaises odeurs, chiens affamés. S'il y a deux visages à Tokyo, alors il a sûrement choisi le moins pimpant. Son père, un français pure souche, s'est vite éclipsé en agitant le drapeau blanc après des vacances bien arrosées à la capitale nippone, en laissant à sa petite hôtesse japonaise un souvenir inoubliable.

Mais hôtesse, ça, c'est un mot bien pratique.

Drogue, prostitution, et caetera. Maman Amano n'a jamais reculé devant rien pour se faire quelques yens, et c'est devenu d'autant plus vrai lorsque Rin est arrivé. Oh, elle l'aimait, son petit bâtard. Bien gentil, bien poli, tout mignon.. un véritable rayon de soleil dans sa vie de suie. Mais le cœur humain est si changeant, si prévisible, qu'il a fallu qu'une porte de sortie apparaisse pour que l'éthique vole en éclats.

La téléportation.

Avant ça, Amano Ai faisait les poches des clients. Au moins, ça permettait d'arrondir les fins de mois. Mais quand son gamin a commencé à fureter partout en quelques clignements d'yeux, ce n'est pas dans une école élémentaire qu'elle l'a envoyé. C'est dans les caisses de Roppongi. Aucun moyen de se faire choper, juste assez rapide pour pouvoir récupérer de quoi s'acheter des jolies robes, plus de bentô à la date limite de péremption ! Le rêve.

Et puis, c'est qu'il avait ça dans le sang, le petit. Son français, il lui avait raconté des histoires mirobolantes, dont une en particulier : celle d'Arsène Lupin, le grand cambrioleur, le gentleman. Il avait fait planer le doute.. peut-être qu'ils partageaient le même sang ? Peut-être même que leur enfant, Rin, était son descendant direct ! De quoi faire frissonner les héros de Tokyo qui, dans leur ignorance, rataient l’avènement du prochain plus grand voleur de l'histoire.

Alors il a volé, le petit Rin. Volé, volé, pour maman, pour survivre. Et puis quand Amano Ai est morte, il a continué de voler. Il a lu les histoires que son père avait laissé, il s'est même dit que, ô grâce, jamais il ne volerait comme un rustre, mais plutôt comme un gentleman. Car c'était lui, le prochain maestro, celui qui, sans jamais se faire attraper, vivrait au-delà de ses moyens au cœur d'une comédie haletante.

Lui, il n'avait pas connu le confort du doux foyer, les repas préparés à la main, et les camarades de classe. Alors pourquoi il devrait respecter les règles d'une société pour laquelle il n'a jamais existé ?

Oui, Rin a volé. Rin est devenu Lupin, le fameux Lupin. Le cambrioleur, l'insaisissable, qui jamais ne blesse, mais jamais n'échoue pour autant. Les inspecteurs se bousculent pour deviner sa prochaine cible, alors que lui, le sourire aux lèvres..

Joue à plouf-plouf avec une carte.